Bien vite, cette modeste échoppe de la rue Saint-Dizier ne convient plus aux ambitions du fondateur qui transfert son affaire en 1881 près de l’ancienne porte Saint-Jean (démolie) et de la gare. Toutefois, Antoine Corbin ne peut faire l’acquisition de terrains pour réaliser ses ambitions et se trouve dans l’obligation de louer de 1881 à 1890 un bâtiment dans l’îlot Mazagran baptisé Maison des Magasins Réunis. Il se rend acquéreur des espaces au fur et à mesure que ces derniers se libèrent. Ces opérations d’acquisition et d’extension des Magasins Réunis s’étaleront sur plus d’une vingtaine d’années. En 1894, sous les auspices de l’architecte Lucien Weissenburger, est érigée la vaste halle vitrée, associée à une « cathédrale de verre » aux yeux du fondateur. Cette même année une première tranche de travaux se termine, et une autre encore s’achèvera après la mort de Corbin en 1901.
![]() |
Ph. Jean Scherbeck - Portrait de Eugène Corbin © Coll. J. Scherbeck |
En 1899, l’affaire qui prospère, est partagée entre les deux fils, Louis (1863-1936) et Eugène Corbin (1867-1952), le futur fondateur du premier Musée de l’École de Nancy et ses deux gendres, Louis Mauljean (1858-1904) et Charles Masson (1858-1929). Mais c’est à Eugène Corbin que l’on doit le formidable développement économique que prendra cette affaire familiale. Entre 1905 et 1910, les Magasins Réunis connaissent de nouvelles constructions qui lui donneront son aspect définitif grâce à l’entreprise France-Lanord et Bichaton. A lui seul, cet immense immeuble symbolise le triomphe artistique et commercial de ce nouveau siècle et d’une ville en pleine expansion.
![]() |
Chantier d'extension vers 1906 © Coll. Flot-Garandeau |
![]() |
Les Magasins Réunis à l'Exposition de 1909 (Nancy) © Coll. Anne Walther |
Lors de l’Exposition internationale de l’Est de la France de 1909 à Nancy, les Magasins Réunis, bien évidemment présent à cette manifestation, sont à leur apogée et affichent une réussite à la hauteur des ambitions des administrateurs. Plusieurs artistes ont apporté leur contribution et non des moindres : Louis Guingot et Jacques Gruber conçoivent les vitraux des deux grandes halles ; les comptoirs en acajou et les ferronneries du grand escalier sont confiés aux ateliers Majorelle ; les globes d’éclairage sont réalisés par la maison Daum et l’on doit les cariatides de bronze de la porte d’entrée à Victor Prouvé…
![]() |
Pavillon des Magasins Réunis à l'Exposition de 1909 (Nancy) © Coll. Anne Walther |
![]() |
Magasins Réunis vus de la place Thiers avant 1914 © Coll. Anne Walther |
D’autres succursales seront établies dans la région et ailleurs, et ce, dès 1890 à Vaucouleurs, Épinal, Charmes, Lunéville, Toul, Pont-à-Mousson, Longwy, Charleville, Maubeuge, Paris, Strasbourg. Mais bientôt, la Première Guerre mondiale stoppe cet élan. Les Magasins Réunis paient un lourd tribut aux bombardements de la ville. Le 16 janvier 1916, l’ensemble de l’immeuble est totalement détruit lors d’un incendie.
![]() |
Entrée principale avant 1916 (extr. du cat. de F. Schertzer, constructions métalliques) © Région Grand Est - Inventaire général / Repr. D. Bastien (IVR41_795401907V_2) |
![]() |
Incendie de 1916 © Coll. Image'Est |
![]() |
Ph. Léopold Poiré - Incendie de 1916 © Coll. F. Charmont |
![]() |
Vue aérienne des Magasins Réunis détruit en 1916 © Coll. J.-L. Burtin- E. Friant (Fruhmholz 37_06Nancy) |
Ils seront reconstruits entre 1926 et 1928 sur les plans de l’architecte Le Bourgeois dans un style Art déco qui fera appel à quelques artistes bien connus (Jean Prouvé réalisera les rampes et balustrades de l’escalier principal, Jean-Louis Burtin, auteur des frises décoratives et Émile Bachelet, sculpteur des bas-reliefs). Les travaux du bâtiment seront confiés à la firme France-Lanord et Bichaton.
![]() |
Reconstruction des Magasins Réunis © Ph. René d'Avril - Coll. J.-P. Puton-Image'Est |
![]() |
Ph. Jean-Louis Burtin - Maquette des Magasins Réunis © Coll. J.-L. Burtin- E. Friant (55-Frumholz002) |
![]() |
Ph. Jean-Louis Burtin - Maquette des Magasins Réunis © Coll. J.-L. Burtin- E. Friant (55-Frumholz005) |
![]() |
Vue générale - Photographie ancienne extr. de P.s Le Bourgeois, Nancy.Travaux d'architecture 1912-1930, Edari (s.d.) © Région Grand Est - Inventaire général / Repr. G. Coing (IVR41_885400062X_2) |
Si la pierre et le fer étaient à l’origine de la première construction, le ciment et des pylônes en fer seront à la base du second édifice qui subira de constants remaniements intérieurs et extérieurs. Jusqu’en 1965, avec ses 12 135 mètres carrés de surface de vente, les Magasins Réunis restent le plus grand magasin de province avant de devenir en 1983 le Printemps qui modifiera de fond en comble l’intérieur.
Blaise AURORA, chef de projet (Image'Est)
![]() |
Ph. Jean Scherbeck - Les Magasins Réunis dans les années 50 © Coll. J. Scherbeck |
![]() |
Ph. Georges Dubois - Vue aérienne des Magasins Réunis en 1975 © Coll. G. Dubois |
• 1867 : ouverture d’un premier magasin rue Saint-Dizier
• 1881 : transfert de l’affaire près de la gare
• 1890 : création de succursales en Lorraine
• 1899 : transformation du commerce en société en nom collectif
• 1901 : Mort de Antoine Corbin, fondateur des Magasins Réunis de Nancy
• 1905-1910 : nouvelles constructions
• 1916 : destruction des Magasins Réunis lors d’un incendie causé par un bombe
• 1926-1928 : reconstruction des Magasins Réunis
• 1983 : les Magasins Réunis deviennent le Printemps
• 2013 : vente aux enchères à Nancy d’une partie de la verrière reconstituée des Magasins Réunis
![]() |
Magasins Réunis avant 1916 © Coll. Image'Est |
• Les Magasins Réunis à travers l’Ecole de Nancy : [catalogue d’] Exposition de mai à septembre 1999 / [Comité d’Établissement du Printemps de Nancy]. Service Régional de l’Inventaire de Lorraine
• 1867-1967 Cent ans d’histoire d’une grande famille : Les Magasins Réunis. – Nancy : Impr. du Centre, 1967. – 98 p. ill.
• Les Magasins Réunis : une réalisation architecturale exemplaire avant la Première Guerre / par Catherine Coley in Le Pays Lorrain, n°2, juin 2000, p. 83
• L’Immeuble et la construction dans l’Est, n°9, 28 février 1926
• L’Est Républicain, 14 décembre 2017