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Carte allemande de l'offensive sur la trouée de Charmes - 1914. © IMAGE'EST |
Après la signature du Traité de Francfort suivant la Guerre franco-allemande le 10 mai 1871, la France perd l'Alsace-Moselle qu’elle ne retrouvera d'ailleurs que le 28 juin 1919, suite au Traité de Versailles. Lunéville, située à 30km au Sud-Est de Nancy est, à la veille des combats, proche de la frontière avec l’Allemagne, en plein milieu de ce que l'on appelle stratégiquement la "trouée de Charmes".
Suite à la défaite de 1871 et du désir de revanche grandissant envers l'Allemagne, la France entreprend la construction d’un système défensif fortifié le long de la nouvelle frontières - sorte d’ancêtre de la ligne Maginot - placé sous la responsabilité du général Séré de Rivières. En 1914, ce système constitue deux rideaux principaux de défense, un axe Verdun-Toul et un axe Epinal-Belfort, dont Charmes constitue le centre. La stratégie de l’armée allemande est donc de traverser le plus rapidement possible la ligne de défense par la trouée de Charmes, moins fortifié et plus facile à percer, pour rejoindre au plus vite la route de Paris. Quant à l’armée française - encore habillée de l’uniforme de 1870, haut bleu marine et pantalon rouge - sa stratégie est de se retrancher sur les hauteurs du Lunévillois pour contrer l’offensive allemande et reprendre l'avantage.
En effet, face à l’urgence pour l’armée allemande de percer la ligne Séré de Rivières en ce seul endroit, les combats sont rudes entre les Allemands et le 26e régiment d'infanterie française composé de quelques Lorrains de la 11e division d'infanterie française également appelée la "division de fer". Or, le Léomont constitue un point stratégique en raison de son altitude et de sa position centrale dans la trouée de Charmes. Du 20 août au 10 septembre 1914, l’ancienne ferme qui domine la colline est le théâtre de multiples tentatives d'offensives de l'infanterie comme de l'artillerie. Mais la nuit du 25 au 26 août se démarque par la violence des combats menés au corps à corps dans la ferme qui, soumise aux bombardements de l’artillerie moderne, transforment la bataille en véritable boucherie.
Au lendemain de la Grande Guerre, beaucoup de personnes de l'arrière sont en soif de comprendre les atrocités commises. Elles veulent voir de leurs yeux les destructions occasionnées sur le front, face au traumatisme des jeunes soldats dont certains ne sont toujours pas démobilisés. C'est dans ce contexte qu'un tourisme mémoriel très lucratif naît au lendemain de la paix et propose des excursions sur les anciennes lignes de front, encore très marqués par la violence des combats. L'agence Peerless de Nancy se spécialise dans ces excursions touristiques de mémoire dès les années 1920. Il est d'ailleurs intéressant de noter que, en parallèle de cette activité touristique, l'entreprise participe activement à l'exhumation des corps, alors très pratiquée en raison de l'aménagement des nécropoles nationales définitives. Rappelons que sur les 1.350.000 soldats français morts au combat durant la Grande Guerre, 620.000 corps seulement sont retrouvés et intègrent une sépulture dans l'une des 265 nécropoles de France. Aujourd'hui, plus de 460.000 soldats restent toujours portés disparus.
Aujourd'hui, un monument aux morts rappel la mémoire de l'atroce bataille sur l’emplacement de l’ancienne ferme, classée monument historique depuis le 1er mai 1922. Détruit durant la Seconde Guerre mondiale, la version actuelle est une copie à l’identique de l’originale. Le site fait l'objet d'un parcours de randonnée découverte incluant le site du Léomont ainsi que la nécropole et le musée du Friscati.
A découvrir : Léomont-Friscati | Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle
Vers 1925 - Paul Rousselot (9,5mm) : 10 ans après les faits, le cinéaste amateur se rend sur place avec sa caméra 9,5mm pour immortaliser le champ de bataille et son monument aux morts, devenant un acteur des prémices du "tourisme mémoriel". Le film illustre clairement la dévastation du champ de bataille, à peine dissimulée par le temps, ainsi que les ruines de l'ancienne ferme.
Plateforme Ouverte du Patrimoine du ministère de la culture : :
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00106437
"L’uniforme du fantassin français en 1914 et 1916". Musée de l'armée.
fiche-7-uniforme fantassin 14.indd (musee-armee.fr)
"Système Séré de Rivières". Consulté le 6 juin 2021.
Système Séré de Rivières — Wikipédia (wikipedia.org)
BENOIT, C. (2014). Les corps disparus des soldats français de la Grande Guerre. Carin.
Les corps disparus des soldats français de la Grande Guerre | Cairn.info
DANCHIN, E. (2015). Le temps des ruines, 1914-1921. Presses Universitaires de Rennes.
DOIZELET, B. (2015). Une nouvelle tenue pour le soldat français : casque Adrian et uniforme bleu horizon. France Archives.
Une nouvelle tenue pour le soldat français : casque Adrian et uniforme bleu horizon (FranceArchives)
THOUVENOT, M. et JALABERT, L. Le Lunévillois et le Léomont. Meurthe-et-Moselle.fr.
http://www.meurthe-et-moselle.fr/actions/centenaire-14-18/la-grande-guerre-en-meurthe-et-moselle/le-lun%C3%A9villois-et-le-l%C3%A9omont