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      • Dossier pédagogique
      • Mars 1960, Khrouchtchev accueilli à Verdun, Claude Bardot, noir et blanc

      • Dossier pédagogique rédigé par Pierrick Hervé, docteur en histoire contemporaine, professeur de Chaire supérieure CPGE BL lycée Guist’hau, Nantes.

      • Mars 1960, Khrouchtchev accueilli à Verdun, Claude Bardot, noir et blanc
      • La lecture de cette fiche est à associer à celle de la fiche FI-0055-0398, les deux documents fonctionnent ensemble.

        Description et contexte

        Une photographie, en noir et blanc, prise par Claude Bardot, illustre le passage de Nikita Khrouchtchev dans l’Est de la France, le 29 mars 1960.

        La foule attend.

        Une foule compacte de femmes et d’hommes dont les vêtements indiquent l’origine populaire se presse, dans le calme, le long de barrières métalliques, surveillée par des troupes de la gendarmerie placées au premier plan du cliché. La foule tassée donne un effet de profondeur cassé par des drapeaux et des banderoles. Des hommes en majorité, quelques femmes et quelques enfants, les regards intrigués et parfois graves, tous dirigés dans la même direction, attendent l’arrivée de Nikita Khrouchtchev. La photographie est sans doute prise peu de temps avant l’arrivée du visiteur espéré. De petits drapeaux tricolores indiquent la nationalité des spectateurs. Nous sommes en France, vraisemblablement à Verdun. C’est la légende du document qui nous l’indique car rien sur ce dernier ne permet d’affirmer une localisation. Deux autres drapeaux de très grande taille intriguent. Placés pratiquement de façon à encadrer une grande banderole barrant la photographie horizontalement, ce sont de toute évidence des drapeaux communistes, rouges portant faucille et marteau. Les différents drapeaux ne sont pas accolés, associés, c’est le cliché qui leur donne une proximité. La grande banderole est une dédicace qui va permettre de donner sens au document. Message d’accueil, elle fixe le lien entre cette foule et l’invité tant attendu. Elle désigne les auteurs, inscrits dans le monde prolétarien du travail de la mine fortement présent dans l’Est de la France. Porteurs de dynamiques politiques et syndicales proches du parti communiste et de la CGT, ils en sont ici les représentants nombreux, unis et serrés. Les plis de la toile empêchent de lire l’intégralité du message sans en dénaturer le sens. Les mineurs accueillent donc Nikita khrouchtchev, désigné de façon claire par des portraits imprimés, brandis de-ci, de-là dans une attitude classique de manifestation et des pancartes porteuses de slogans simples comme Paix et Amitié. La foule attend.

        Le PCF omniprésent.

        Il est possible de voir les autres dimensions que prend cette photographie. Elle parle également de la façon dont se déroule le voyage, de l’investissement du parti communiste français et des associations comme France-URSS.

        Un intense effort de propagande soviétique est soutenu par l’intervention du parti communiste français et des associations proches comme France-URSS pour préparer la venue de Khrouchtchev. En amont du voyage, les autorités soviétiques ne tarissent pas d’éloges sur les qualités de la science française et rappellent la résistance commune face au nazisme, Soulignant les liens entre les deux nations. L’URSS est aussi de moins en moins critique sur la situation de l’Algérie, soutenant sans le reconnaitre officiellement le GPRA, alors même que vient d’avoir lieu à Alger la semaine des barricades. Cependant les deux parties s’opposent sur la question de Berlin, que les Soviétiques voudraient associer au désarmement alors que le 13 février 1960 se déroule la première explosion nucléaire française. L’URSS est aussi de moins en moins critique sur la situation de l’Algérie, soutenant sans le reconnaitre officiellement le GPRA, alors même que vient d’avoir lieu à Alger la semaine des barricades.

        Le voyage est un vrai challenge pour le PCF qui doit montrer son inscription dans la vie politique française, ses capacités de mobilisation des troupes de militants et de sympathisants, tant politiques que syndicales, et donc le poids réel de son secrétaire général, Waldeck-Rochet. Il doit montrer son pouvoir de relais des propos de Khrouchtchev en France. Il s’attaque aux diverses formes de l’anticommunisme qui s’expriment dans l’opposition au voyage. Il dénonce aussi les socialistes que la rhétorique désigne comme réactionnaires. Il se lance donc dans un travail préparatoire au voyage avec des militants mobilisés, via les associations et les syndicats pour réussir l’accueil populaire. Il diffuse le film du voyage de Khrouchtchev aux États-Unis, prépare les rencontres culturelles comme la venue des chœurs de l‘Armée rouge. La mobilisation des travailleurs est aussi un enjeu comme le montre sur la photographie la banderole des mineurs. Les anciens résistants communistes sont mobilisés pour la visite de Khrouchtchev au Mont Valérien. La jeunesse est aussi mobilisée pendant tout le voyage. Pour le PCF cette mobilisation est sans doute surtout affaire de politique intérieure, même si ce n’est pas le PCF qui invite le premier soviétique. L’impact des politiques mises en place par Khrouchtchev sur les communistes français, ressenti comme leader d’un monde nouveau, fait de libertés revendiquées, rend le communisme séduisant. La perspective d’une collaboration entre les deux États donne aux communistes l’illusion d’un rôle nouveau dans la vie politique française mais aussi l’illusion que l’engouement pour le voyage puisse se traduire en engouement pour l’URSS qui donne l’exemple par sa modernité et sa volonté de construire la paix. Le PCF profite de la popularité de Khrouchtchev pendant son voyage, s’il est difficile d’en évaluer la profondeur, la mobilisation est cependant réelle comme le souligne la photographie. Elle a même tendance à créer la mobilisation populaire que le gouvernement semblait vouloir éviter. Cet accueil de Khrouchtchev est aussi et peut-être même surtout affaire de politique intérieure.

        Approche pédagogique pour les classes de terminale des lycées généraux et technologiques.


        La photographie trouve aisément sa place dans le Thème 2 du programme de terminale générale, notamment dans le chapitre consacré à la multiplication des acteurs internationaux dans un monde bipolaire (de 1945 au début des années 1970) auquel peuvent être consacrées 13 à 15 heures. Après avoir présenté la fin de la Seconde Guerre mondiale et les débuts d’un nouvel ordre mondial faisant émerger de nouveaux types de tensions entre les deux superpuissances, se met en place une nouvelle donne géopolitique autour de la bipolarisation et de l’émergence du tiers-monde.

        Si les relations sont bien conflictuelles rythmées par des crises majeures, elles sont aussi après 1953 marquées par des rencontres, et en 1956 la proposition soviétique de la coexistence pacifique portée par Nikita Khrouchtchev. Cette dernière n’empêche nullement les tensions mais propose une nouvelle organisation des relations internationales, faites de rencontres, de sommets, de négociations. La photographie devient le support d’une autre lecture de la guerre froide, permet de mettre en place l’un des modèles, mais surtout de montrer comment s’établissent des relations nouvelles, par rencontre entre les chefs d’État, comment ces dernières servent la propagande des États et aux forces politiques. A l’échelle des superpuissances se surajoutent celle des puissances moyennes. Le cas de la France, hôte du premier chef d’État soviétique à faire le déplacement, doit être expliqué. Nouvelle puissance nucléaire, dotée d’un nouveau régime dont le président appelle à la grandeur et au rang en matière de diplomatie, la France voit dans ce voyage un moyen d’affirmer son originalité au sein du bloc occidental. Nous sommes alors bien dans l’intitulé du programme, les débuts de la Ve République : un projet liant volonté d’indépendance nationale et modernisation du pays. La photographie sert aussi de support à l’étude de la vie politique intérieure en montrant la place et le rôle du parti communiste français, parti d’opposition qui a tout intérêt à rendre ce voyage réussi en mobilisant ses troupes, nombreuses sur la photographie et dans tous les endroits visités par Khrouchtchev. La recherche de la place de ce dernier dans la vie politique française, les formes d’anticommunisme dont il est victime, donne une dimension plus forte au commentaire de la photographie.

        En pratique, l’analyse de la photographie permet de mettre en évidence les composantes qu’une recherche numérique vient expliquer :    

        • Portrait de Khrouchtchev support de l’étude de l’État soviétique (place de l’homme dans le fonctionnement du régime, données biographiques de la Révolution à la coexistence pacifique…).
        • Organisation des voyages à l’étranger (le précédent aux États-Unis, le cas français, de nombreux travaux accessibles sur internet présentent et commentent ce voyage).
        • Lieux visités, place de Verdun dans une approche historique et de propagande (héritage des guerres du vingtième siècle, place de l’Allemagne dans la guerre froide, dans les relations franco-soviétiques, temps de construction européenne).

        Les terminales technologiques trouvent également matière dans ce type de document dans le Thème 2 – Du monde bipolaire au monde multipolaire à faire entre 5 et 7 heures.

        Le monde de 1945 à nos jours. Guerre froide. Monde bipolaire. Décolonisation. Monde multipolaire. Construction européenne.

        Le document est tout à fait propice à « montrer les dynamiques géopolitiques qui sous-tendent l’évolution du monde de 1945 à nos jours, depuis la bipolarisation de la guerre froide jusqu’au monde multipolaire marqué par de nouvelles formes de conflits ». L’étude du chapitre 3, La France, une nouvelle place dans le monde trouve également dans le document un support intéressant et utile pour nourrir une réflexion sur Les débuts de la Ve République : un projet liant volonté d’indépendance nationale et modernisation du pays.

        L’approche multiscalaire permet de passer d’un fait local à sa dimension internationale.

        Bibliographie et sitographie.

        Thomas Gomart, Double détente, les relations franco-soviétiques de 1958 à 1964, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2005.
        Elizaveta Spiridonova, La visite de N. S. Khrouchtchev en France (23 mars-3 avril 1960). Histoire. 2014. ffdumas-01016923f

        De nombreux articles de la presse nationale et locale abordent ce voyage et sont consultables sur Internet.

      • Publié le 15/07/2022
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