Cette photographie de wagons « torpilles », est imprimée en noir et blanc sur un support photomécanique. Autrement dit, il s'agit « d'un procédé inventé à la fin du XIXe siècle afin de reproduire une photographie en masse plutôt qu'à l'unité. Des moules et des plaques sont créés à partir de la photographie et utilisés pour imprimer un journal par exemple. Ce processus implique la gélatine au chromate, qui durcit dans les zones exposées créant des variations topographiques qui correspondent aux tons de l'image » (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, 2012). Le support choisi est le papier et non un papier photosensible comme pour une photographie habituelle.
La datation précise est complexe. Pour autant, il est possible d’avancer qu’elle a été prise entre 1880 et 1930, puisqu’elle est issue de l'ouvrage "Aciéries de Longwy - 1880-1930", imprimé en 50 exemplaires et destiné à commémorer le cinquantième anniversaire de la fondation des Aciéries de Longwy en 1930. Au regard de l’impression, la photographie se situerait donc aux alentours des années 1930. Son auteur est Jean Scherbeck. Il a travaillé à la demande des Aciéries de Longwy dans le cadre de ses œuvres sociales.
« Jean Scherbeck, né en 1898 à Champigneulles (54) et mort en 1989, est à la fois photographe, dessinateur et illustrateur reconnu. Il est formé chez un photographe portraitiste à la fin de la Première Guerre mondiale et aussi par les artistes Emile Friant, Victor Prouvé et Henri Royer. Ainsi, il peint et utilise la technique du pastel. Ses portraits d'anciens bretons, lorrains et alsaciens, comme les Mâmiches, font partie de ses œuvres les plus célèbres. Il travaille également la photographie et possède à Nancy un studio depuis 1922. Il photographie surtout de jeunes enfants. Il est également l'auteur des clichés imprimés dans l'ouvrage Aciéries de Longwy : 1880-1930 dont fait partie cette photographie. Environ 500 photographies et dessins sont conservés dans les locaux de l'association Image'Est. Certains d'entre eux sont numérisés sur le site internet. » (Mariotti, 2019).
La photographie est prise avec un angle de vue qui permet de voir l’ensemble du convoi ferroviaire. Au premier plan, nous pouvons voir les rails du site industriel. Au second plan, l’auteur nous montre des tonneaux revêtus intérieurement de briques réfractaires pouvant chacun contenir 30 tonnes de fonte liquide. Elles reposent sur des « bogies » (chariots placés sous les trains et sur lesquels sont fixées les roues), et poussés par une locomotive à vapeur. Cette photographie est saisie sur le site des hauts fourneaux de Mont-Saint-Martin. Dès que les coulées sont terminées, les poches (tonneaux) de fonte liquide sont conduites à l’aciérie Thomas pour être versées aux mélangeurs. À l’arrière-plan, nous distinguons des bâtiments industriels, avec une toiture en dents de scie, appelée shed, qui semblent être des entrepôts destinés au stockage.
Au début du XXe siècle, l’industrie sidérurgique bat son plein dans le bassin lorrain. Par exemple, en 1929, l’aciérie Thomas produit 424 564 tonnes d’acier soit 6,4% de la production française. Entre 1931 et 1932, la production d’acier Thomas passe de 368 905 tonnes d’acier à 256 524 tonnes. La production fluctue ainsi à ce niveau jusqu’en 1939 (Association des Anciens de la Providence une usine du bassin de Longwy, 1996).
Les poches de fonte produites sur le site de Mont-Saint-Martin, sont conduites à l’aciérie Thomas dont le contenu est versé dans les mélangeurs. La fonte amenée des fourneaux dans les poches tonneaux, dont nous avons parlé, est déversée dans un mélangeur. Le rôle des mélangeurs est de constituer une quantité de fonte liquide qui permet de rendre la marche de l’aciérie indépendante de celle des hauts fourneaux, et de donner au mélange de plusieurs coulées, une composition relativement constante. La fonte est ensuite introduite dans des convertisseurs qui permettent d’obtenir les propriétés mécaniques souhaitées de l’acier avant d’être coulé en lingots. Ces derniers sont ensuite transformés par des laminoirs offrant ainsi de la matière première pour l’ensemble de l’industrie. Ce produit fini permet, par exemple, de fabriquer des wagons, des bogies et des rails notamment.
C’est ainsi que les poches de fonte sont transportées sur des wagons appelés « wagons torpilles » ou « wagons cigares ».
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Séance pédagogiquepdf - 84 Ko